Le filon des mines d’or s’épuise en Afrique du Sud

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Depuis le début de la ruée qui a fondé Johannesburg en 1886, l’or a nourri le développement industriel de l’Afrique du Sud. Cette ère semble aujourd’hui révolue.

En combinaison, bottes aux pieds, prêts à plonger dans les entrailles de la terre. Chaque matin, une centaine d’ouvriers font le pied de grue devant la mine d’or sud-africaine d’Evander (nord-est), dans l’espoir d’une embauche pour la journée.

« Depuis trois mois, on se présente ici tous les jours dès 5H00 du matin en espérant que le patron fera appel à nous », lâche un des postulants, Andile Skweyiya.

Ils vont une nouvelle fois rester sur le carreau.

Avec ses anciens collègues, ce mineur est l’une des 1.710 victimes de la dernière vague de dégraissages ordonnée en mai par la compagnie Pan African Resources à Evander, à deux heures de route de Johannesburg.

« Les chances de trouver un nouvel emploi n’existent pas », déplore l’un d’eux, Vuyiswa Shlungunyana, 32 ans. « Sans travail, il n’y a pas d’autre choix que de voler pour pouvoir manger, et ça, je refuse de le faire ».

Après leur licenciement, quelques-uns de ses collègues ont obtenu des contrats de courte durée. Les autres grossissent la queue tous les matins devant la mine.

Depuis le début de la ruée qui a fondé Johannesburg en 1886, l’or a nourri le développement industriel de l’Afrique du Sud. Cette ère semble aujourd’hui révolue.

La baisse des cours du métal jaune, l’épuisement des réserves qui impose de creuser plus profondément, la hausse des salaires des mineurs et la baisse de la productivité ont fait des ravages dans les effectifs.

« Nos mines d’or sont les plus profondes du monde, les sites sont de plus en plus éloignés de nos infrastructures, les coûts ont bondi », plaide la porte-parole du Conseil des industries minières, Charmane Russell.

Les trois quarts des mines d’or du pays ne sont plus rentables aujourd’hui, annonce le Conseil, qui prévoit un fort recul de la production vers 2019-2020 et l’épuisement des filons dès 2033.

Mardi, Gold Fields a annoncé qu’il comptait licencier sur son site de South Deep, près de Johannesburg, 1.100 de ses 3.600 salariés et se séparer de 460 sous-traitants. Les motifs ? Les mêmes qu’à Evander : « Coûts d’exploitation en hausse, (…) la complexité de l’exploitation à 3.000 m de profondeur, (…) productivité en dessous de la moyenne ».

« Il faut se préparer à de fortes pertes d’emplois qui ne seront jamais remplacés », anticipe l’économiste Andrew Levy.

Ce déclin est partagé par l’ensemble du secteur minier.

Au meilleur des années 1980, le secteur a employé jusqu’à 760.000 salariés et contribué jusqu’à hauteur de 21% au produit national brut (PNB). Ses effectifs ont fondu à 460.000 en 2017 et il ne fournit plus désormais que 10% du PNB…

Pour résister, les compagnies minières tentent d’exploiter le fer, le manganèse et surtout le platine, dont l’Afrique du Sud détient l’essentiel des réserves mondiales.

Mais au début du mois, Impala Platinum a annoncé la suppression de 13.000 emplois sur sa mine de platine de Rustenburg.

Le Syndicat national des mineurs (NUM) refuse la fatalité d’une disparition des mines d’or.

A ses yeux, les entreprises comme Pan African « veulent recourir à des intérimaires pour baisser le coût du travail », enrage le syndicaliste Tshilidzi Mavhuda.

‘Volés’                     

Sollicitée par l’AFP, Pan African n’a pas réagi à cette accusation.

Fraîchement licencié, Vuyiswa Shlungunyana a déjà recommencé à travailler à Evander. Mais à des conditions bien moins favorables.

« Tu es payé nettement moins et si tu tombes malade, c’est ton problème », résume-t-il.

Marié et père de trois enfants, Gugu Malatza, 33 ans, doit aussi subvenir aux besoins de sa mère, sourde, et de sa famille au sens large, qui vit dans un township proche de la mine.

Autant dire que son revenu d’à peine 32 Rands (2 euros) l’heure n’y suffit pas.

« On se fait voler, on est condamné à vivre dans la pauvreté. Pas de soins médicaux pris en charge. Plus rien pour le logement », se plaint Gugu Malatza.

En pleine négociation avec les entreprises et les syndicats sur les nouvelles règles qui doivent régir le secteur, le ministre des Mines Gwede Mantashe a promis d’améliorer la vie des travailleurs.

« Les mines, c’est d’abord une question d’êtres humains », a-t-il énoncé, « sans humains il n’y a pas de mines ».

Ex-patron du syndicat des mineurs sous l’apartheid, le président du pays Cyril Ramaphosa s’est reconverti, et enrichi, en patron tout court, notamment dans des compagnies minières.

En quête d’investissements étrangers, il a promis de remettre à plat le secteur : « Nous voulons que cette nouvelle charte minière soit finalisée pour relancer toute l’industrie ».

Les mineurs, eux, n’y croient guère. « Il (le président) a oublié ce que c’est que d’être pauvre », assène Vuyiswa Shlungunyana, « on ne peut pas avoir confiance en nos dirigeants (…) ils mangent à la table des patrons des mines ».

Par Leader & AFP

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